
DIVAS
-La vie et la scène :
Confrontées à la réalité du métier, façonnées par l'étude de répertoires, exposées aux exigences des collaborateurs depuis de nombreuses années, Eva Nyakas et Diana Gonnissen se sont réunies dans un travail qui permet de " déposer leurs paquets " et de faire bénéficier un plus large public de la musique dite " sérieuse ". Sous le mode humoristique elles relatent, en somme, les aléas de leur vie de chanteuse, les méandres de leur vie de femmes, les fantasmes de gloire, les illusions perdues et les paris gagnés de la vie.
Prenons un opéra et transposons-le dans la réalité. Dépêchez-vous alors d'appeler les urgences car les personnages qui sortent tout droit des livrets d'opéra sont tous des écorchés, hystériques, tourmentés, maudits, paranoïaques, sans philtre émotionnel, continuellement dans l'exagération des mots et des situations… Il faut les enfermer! Or, ces personnages sont justement les témoins de la dynamique humaine et permettent d'exprimer avec feu ce qui nous tourmente, hommes et femmes du XXIe siècle.
Larmes ou rires, l'exagération de l'expression deviendra une catharsis.
C'est une façon de rallier un public vers une conscientisation de l'être. Une façon de l'initier à la musique classique.
-Elaboration et écriture :
Nous travaillons par improvisation en nous basant aussi sur des ouvrages tels que " l'Opéra ou la défaite des femmes " de Catherine Clément. Il y a de la magie dans notre groupe de travail. Chacun apporte une pierre à l'édifice et la construction baroque tend vers une belle verticalisation car tous ceux que nous croisons dans notre sillage nous apportent un nouvel éclairage.
Diana Gonnissen, chanteuse lyrique et comédienne démontre que les moments passés en compagnie des comédiens du Magic Land Théâtre dans les brigades du Gag tout autant que les études au Centre d'études Théâtrales à Louvain-la-Neuve -notamment chez le professeur Jean-Pierre Sarrazac- prennent ici toutes leurs saveurs.
-Les personnages :
L'accordéoniste ouvre le spectacle en entrant sur une scène encombrée de caisses de carton. Caisses de déménagement éparpillées ça et là, petit mobilier (table, tabouret, échelle, miroir sur pieds…) jonchent le sol. Il termine d'en apporter encore quelques-unes tandis que Faustina (Diana Gonnissen) entre et s'affaire, elle aussi. Elle se met à nettoyer le miroir et fredonne l'air de Thaïs de Massenet : " ô mon miroir fidèle, rassure-moi… Dis-moi que je suis belle et que je serai belle éternellement. Que rien ne flétrira le rose de mes lèvres, que rien ne ternira l'or pur de mes cheveux… " … Et bien évidemment à force d'interroger son miroir, arrive ce qui doit arriver dans ce cas-là : le bon génie - à moins que ce ne soit aussi un peu le diable- apparaît : c'est Lucia (Eva Nyakas) révélateur, interlocutrice, censée apporter la lumière, sortant du miroir.
L'accordéoniste est celui qui a disposé les caisses dans l'espace de jeu. C'est lui qui a donné le " La ". C'est lui qui distribue " les paquets-surprises de la vie" que l'on déballe tout au long de l'histoire. C'est lui aussi qui induit les différents climats émotionnels qui conduisent Faustina à s'interroger, se révolter, se moquer… Il est en quelque sorte un peu le diable qui tire les ficelles de ce scénario.
Faustina naît dans ce décor et se dépêtre dans les pièges existentiels. Elle s'interroge sur la vie, la mort, l'amour… Bref, les grands thèmes sans cesse exploités par les compositeurs d'opéra parce qu'elle est chanteuse lyrique. Toute en émotions qui la submergent, toute en nuances qui se confondent et s'emberlificotent. Mais comme elle est aussi un être humain elle trouve des résolutions burlesques, pleine de non-sens, en décalage… Faustina est obsédée par l'idée de la mort (et pour cause, chacun des rôles qu'elle a tenu, c'était des héroïnes qui mourraient à chaque coup) et aimerait savoir " combien ", combien de temps il lui reste à vivre. Lucia lui répondra : " Environ une heure. Vous mourrez dans une heure. A la fin du spectacle. " Dès lors la pièce devient un microcosme de la quête humaine existentielle.
Lucia. Puissante interlocutrice, elle pose les bonnes questions, c'est-à-dire celles qui dérangent ou celles que l'on ne s'était pas posées. C'est une femme d'affaire. On ne parle pas à la légère devant elle. On mesure, soupèse les mots, on respire avec intelligence, on évite les lapsus, les actes manqués. Elle voit tout, sait tout et est d'une efficacité rare. Evidemment elle est parfois tellement pragmatique (elle s'endort dès qu'elle s'ennuie), elle peut se révéler insaisissable dans sa logique (elle a faim et coupe court à l'argumentation)… Par certains aspects, on pourrait la qualifier de cerveau reptilien sur patte.
Dossier de présentation